Dans le cadre d’un engagement fort face à des enjeux humanitaires majeurs liés à la migration, le Processus de Rabat a tenu une Réunion Thématique d’envergure consacrée à la question des personnes migrantes disparues, les 9 et 10 juillet à Banjul.

Cet événement, coprésidé par la Gambie et la Suisse, avec le soutien du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a rassemblé durant deux jours plus de 100 participants issus de 27 pays partenaires, ainsi que des experts d’organisations nationales, régionales et internationales de premier plan. Ensemble, ils ont élaboré des recommandations concrètes et orientées vers l’action, appelant à une gouvernance migratoire fondée sur des principes et centrée sur la protection, afin de répondre à la tragédie humaine que représentent des disparitions de personnes migrantes.

S’inscrivant dans le cadre du Domaine 3 du Plan d’action de Cadix - notamment l’objectif 5b et l’action 17 - les échanges ont porté sur la prévention des pertes de vies humaines le long des routes migratoires, le renforcement des mécanismes de recherche et d’identification des personnes migrantes disparues, ainsi que l’appui concret aux familles et communautés affectées. Fait marquant, cette réunion a constitué la première rencontre en présentiel du Réseau des Points Focaux Nationaux pour les personnes migrantes disparues, représentant une avancée significative dans les efforts visant à renforcer la coopération transfrontalière directe et à établir un climat de confiance entre les principaux acteurs des réponses nationales.

Construire des réponses coordonnées et fondées dans les droits humains

La première journée de la réunion a posé les bases de réponses nationales et régionales renforcées face à la problématique des personnes migrantes disparues. Au-delà des statistiques, les intervenants ont souligné la souffrance humaine profonde des familles restées sans nouvelles de leurs proches, appelant à replacer l’humain au cœur de cette crise. Parmi les principaux enseignements figurait un appel commun à combler l’écart entre les engagements politiques et leur mise en œuvre effective. Le renforcement des capacités étatiques, en particulier à travers les Points Focaux Nationaux, a été identifié comme un levier essentiel. Ces derniers jouent un rôle central dans la coordination des efforts sur le plan national, la coopération transfrontalière, le partage d’informations et l’établissement d’un climat de confiance avec les familles affectées.

Le rôle crucial des cadres juridiques solides, fondés sur le droit international des droits de l’homme, le droit des réfugiés et le droit maritime, a également été souligné. Les instruments et outils existants présentés par le CICR, l’OIM, le Conseil de l’Europe et INTERPOL – tels que les mécanismes médico-légaux et de recherche – ont été mis en avant comme des ressources précieuses pour soutenir l’identification digne et la gestion des personnes migrantes décédées. Cependant, les intervenants ont souligné que ces outils doivent s’accompagner d’empathie, d’un engagement direct sur le terrain et d’une coopération durable fondée sur le respect de la dignité humaine.

Les pays partenaires tout au long des parcours migratoires, notamment la Gambie, le Sénégal et la Suisse, ont mis en évidence des initiatives pratiques telles que la création de groupes de travail, de bureaux d’accueil et d’orientation, ainsi que des actions de sensibilisation communautaire, traduisant les principes en actions concrètes. En outre, l’importance des données a été un fil conducteur tout au long de la réunion, tant pour orienter les politiques et assurer la redevabilité que pour protéger la vie privée et la sécurité des familles ayant le courage de témoigner. La protection des données a ainsi été reconnue comme un pilier essentiel de l’ensemble des actions menées.

Avant tout, les échanges ont souligné avec force la nécessité d’un changement de paradigme dans la gouvernance migratoire — un paradigme fondé sur la solidarité, la prévention, la responsabilité, et la reconnaissance du rôle essentiel des familles de personnes migrantes disparues, non pas seulement comme bénéficiaires, mais comme acteurs pleinement engagés dans la recherche de solutions.

De la réflexion à la pratique : renforcer l’action et la coopération

La deuxième journée s’est tournée vers la mise en œuvre pratique, en se concentrant sur la cartographie des réponses existantes et le renforcement de la coopération.

Les participants ont pris part à des discussions en petits groupes pour explorer les réponses nationales et identifier des moyens concrets de construire la confiance, renforcer la coordination entre les parties prenantes, et favoriser la collaboration transfrontalière. Un exercice de scénarios a illustré comment une action médico-légale humanitaire peut garantir une gestion digne des personnes migrantes décédées, soulignant le besoin de coopération transfrontalière, de coordination interdisciplinaire et d’un engagement constant envers la dignité humaine et la vérité pour les familles concernées.

La discussion finale a ouvert la voie à l’avenir, avec le CICR, en tant que Secrétariat du Réseau des Points Focaux Nationaux pour les personnes migrantes disparues, appelant à des actions concrètes pour concrétiser les engagements du Processus de Rabat. Les participants ont identifié les principaux acteurs à mobiliser dans la mise en œuvre des réponses, notamment les familles, la société civile, les communautés de la diaspora, les ambassades et services consulaires, les forces de l’ordre, les universités ainsi que les Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, entre autres.

Afin de promouvoir des réponses efficaces, plusieurs recommandations ont été formulées, notamment : 

  • Renforcer le Réseau des Points Focaux Nationaux pour les personnes migrantes disparues : S’inspirer de modèles existants comme la structure à double point focal de la Suisse et nommer des (co-)points focaux au sein des ministères concernés afin de garantir une collaboration interinstitutionnelle.
  • Améliorer le soutien aux familles et aux survivant.e.s des parcours migratoires : Impliquer activement les familles dans la prise de décision et leur fournir une assistance psychosociale et juridique, en particulier dans les contextes où la peur ou la stigmatisation les empêche de se manifester.
  • Améliorer les systèmes de données et la sensibilisation : Mettre en place des bases de données nationales, promouvoir un partage d’informations transfrontalier responsable, et intensifier les campagnes de prévention mettant en lumière les risques liés à la migration irrégulière.

Un engagement collectif pour la dignité et la justice

La Gambie et la Suisse ont clôturé la réunion en adressant un message fort et unanime : aucune personne migrante ne doit être oubliée, et aucune famille ne doit rester sans réponse. 

Cette réunion a marqué un tournant vers une coopération régionale plus efficace. Le Réseau des Points Focaux Nationaux pour les personnes migrantes disparues incarne une responsabilité partagée et un engagement collectif en faveur de la dignité, de la justice et de la vérité. La voie à suivre est claire : il est temps de traduire les principes communs en actions concrètes, centrées sur l’humain – avec courage, compassion et coopération à chaque étape.

Consultez toutes les recommandations réunies dans le Document final. 

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