Le 26 novembre 2025, la quatrième réunion du Réseau des Points Focaux Nationaux (PFN) pour les personnes migrantes disparues a marqué une nouvelle étape importante dans les efforts continus visant à améliorer l'identification et la coopération internationale concernant les cas de personnes migrantes disparues.

Organisée par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et co-convoquée par la Suisse et la Gambie avec le soutien du Secrétariat du Processus de Rabat, cette réunion a réuni plus de 40 participants, dont des représentants des pays partenaires du Processus de Rabat et d'organisations internationales clés. S'appuyant sur les priorités identifiées lors de la Réunion Thématique de Banjul en juillet 2025, cette réunion a mis l'accent sur les expériences des familles de personnes migrantes disparues, mettant en lumière les lacunes persistantes dans les mécanismes de recherche, d'identification et de soutien. Elle a offert un espace pour réfléchir à ces défis et explorer des moyens concrets de renforcer des approches coordonnées, humaines et efficaces.

Les discussions ont souligné la nécessité de disposer de points d'entrée clairs pour les familles et d'une coordination plus étroite entre les autorités nationales, les acteurs chargés de l'application de la loi ainsi que les organisations internationales et de la société civile, en identifiant des mesures concrètes afin de renforcer les mécanismes nationaux et transfrontaliers.

La voix des familles : un appel à la clarté et au soutien

Le témoignage d'une Guinéenne ayant perdu sa sœur en mer en 2023 a illustré les difficultés majeures auxquelles sont confrontées les familles dans leur quête de réponses. Elle a décrit l'incertitude quant aux personnes à contacter, aux procédures à suivre et à la manière d'entamer un processus de recherche ou d'identification. En raison de communications et de coordinations limitées entre autorités nationales, et malgré des récits précoces de témoins ainsi que le soutien continu d’une organisation locale de la société civile, sa famille a attendu un an avant que sa sœur ne soit identifiée.

Cette incertitude prolongée reflète la situation de nombreuses familles, confrontées à un soutien institutionnel limité, à l’absence de mécanismes transfrontaliers accessibles et faisant face à une charge financière importante, aggravant leur détresse psychologique et retardant la clôture juridique.

Au-delà de la souffrance émotionnelle, ces tragédies fragilisent des ménages et des communautés déjà vulnérables, parfois dépendants du soutien économique de leurs proches qui décident de migrer. Ce cas souligne le besoin urgent de points d'entrée clairs pour les familles, d'une coopération plus étroite entre les États, d'une implication proactive des services diplomatiques et d'une meilleure assistance psychosociale pour les personnes touchées.

Vers une coopération multipartite renforcée : combler les lacunes en matière d'information

Le président de l'organisation « Comitato 3Ottobre », créée après le naufrage de Lampedusa en 2013 qui a causé la mort de plus de 360 personnes, a partagé son expérience de plusieurs années auprès des familles de personnes migrantes disparues et a souligné les défis structurels qui les laissent trop souvent sans réponses. Il a insisté sur le manque de coordination entre les autorités nationales et a rappelé que ces cas impliquent souvent plusieurs pays, ce qui rend indispensable une coopération internationale renforcée.

Il a également mis en avant la nécessité d'un système commun de collecte de données et d'un partage coordonné des informations entre les autorités compétentes afin de facilité des processus d'identification efficaces. Malgré les avancées permises par l’action de personnes bénévoles, des solutions durables nécessitent un leadership étatique, des systèmes de données harmonisés, une coopération transfrontalière et un soutien psychosocial soutenu. Le Comitato 3 Ottobre a présenté des propositions au Parlement européen, affirmant que des progrès significatifs dépendent d'un engagement plus fort des autorités et de partenariats formels avec les acteurs de la société civile.

Renforcer la coopération régionale et internationale sur les personnes migrantes disparues

INTERPOL, qui a participé à la Réunion Thématique de Banjul et a récemment rejoint le réseau, a fait part de son rôle essentiel dans la localisation et l'identification des personnes migrantes disparues ou décédées grâce à son réseau mondial de 196 pays membres et à leurs Bureaux centraux nationaux (BCN). Les outils utilisés comprennent les notices jaunes, les avis concernant les corps non identifiés accompagnés de données biométriques et la base de données ADN I-Familia, qui s'appuie sur une expertise reconnue en matière d'identification des victimes et de médecine légale. Des obstacles juridiques et politiques subsistent, mais INTERPOL s’efforce de sensibiliser les BCN et de les mettre en relation avec le Réseau des Points Focaux Nationaux pour les personnes migrantes disparues afin d'améliorer la coordination et le soutien dans les cas de personnes migrantes disparues.

La France, en tant que présidence actuelle du Processus de Khartoum, et le Secrétariat du Processus de Khartoum ont présenté les efforts entrepris pour traiter la question des personnes migrantes disparues, en s'appuyant sur l’expérience du Processus de Rabat. Pour la première fois au sein du Processus de Khartoum, le Plan d'action du Caire 2025 inclut une section dédiée aux personnes migrantes disparues. À la suite d'un premier webinaire organisé en septembre, la France et le Secrétariat du Processus de Khartoum ont tous deux rappelé la nécessité de renforcer l'expertise, d'harmoniser les approches et de tirer les enseignements du Processus de Rabat, tout en explorant les possibilités de collaboration opérationnelle et d'activités conjointes pour relever des défis transrégionaux tels que celui des personnes migrantes disparues.

Perspectives d'avenir

Le Réseau s'est considérablement développé depuis 2024 et a franchi une étape importante avec sa première Réunion Thématique en présentiel à Banjul, qui a renforcé la coopération régionale sur les personnes migrantes disparues et favorisé les échanges entre les points focaux. En décembre 2025, 23 pays partenaires du Processus de Rabat ont officiellement désigné un point focal. Les conclusions et recommandations issues de cette réunion servent de lignes directrices au réseau.

Cette quatrième réunion a réaffirmé l'engagement commun de poursuivre la mise en place d’une approche coordonnée et centrée sur les familles de personnes migrantes disparues. Les informations recueillies serviront de base aux activités futures dans le cadre du Processus de Rabat et aux travaux en cours du Réseau des Points Focaux Nationaux pour les personnes migrantes disparues.

À partir de 2026, la Suisse assurera la présidence du Processus de Rabat. La Suisse entend maintenir la dynamique engagée lors de la Réunion Thématique de Banjul et soutenir la poursuite de la mise en œuvre du Réseau, notamment à travers l'organisation de réunions régulières. Le prochain échange en ligne du Réseau est prévu pour mars 2026, sous la future présidence suisse du Processus de Rabat.